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Christine & the queens

lundi 30 mars 2015 par Anne Emeraud rédaction CC by-nc-sa

Compte-rendu

Christine & the Queens passait à Château Rouge le 14 mars dernier. Et j’y suis allée. Pour voir. Pour savoir, poudre aux yeux ou émotion non feinte... Je me suis tenue à distance, je suis restée prudente, vigilante. J’ai voulu voir si je pouvais être conquise. Je suis repartie après un beau spectacle, sur ma faim.

Il faut dire, pour être franche, que Chaleur Humaine, son album sorti en juin dernier, m’avait vraiment retenue ; retenue de me tourner vers autre chose, d’autres sons. Je l’ai écouté, écouté réécouté pendant plusieurs mois, tentant parfois des incursions ailleurs mais revenant toujours à ces morceaux... Et puis, tout s’est épuisé, au moment même où, autour de moi, son nom revenait, prononcé comme pour parler d’un jeune prodige. Les mots étaient lâchés ; et mon oreille, usée, presque nauséeuse.
J’ai donc fini par refermer tout ça.
Mais dans ces cas-là, la tentation est grande de retrouver le bonheur initial, l’émerveillement originel provoqué par un son, une atmosphère, un message. C’est bien ça qui m’a conduite à aller la voir le 14 mars dernier.
Plusieurs mois se sont écoulés entre ma découverte de l’album de Christine & the Queens et ce concert - heureusement puisque j’ai pu arriver à Château Rouge l’esprit calme et apaisé, délivré de toute attente démesurée. Je voulais juste voir si j’allais retrouver le plaisir de la découverte, de la première fois.

La salle est très grande et la fosse déjà densément occupée. Je choisis d’emblée de m’asseoir dans les gradins ce qui n’est pas dans mes habitudes. Peu importe. La salle se remplit. Complètement.
A côté de moi, une dame me raconte qu’elle l’a déjà vue en concert mais qu’à cette époque, elle ne dansait pas. Elle ne dansait pas. Je suis surprise d’entendre ça, de me rendre compte de l’importance que cela peut avoir, la danse. Je n’attends rien. En particulier pas ça.

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La lumière s’éteint. La foule hurle, applaudit. Comme si déjà, tout était fini. Comme s’il n’y avait rien à faire, rien à dire, rien à voir, rien à écouter. Tout le monde est déjà conquis avant même qu’une note soit jouée, un mot chanté...
_Et donc, elle apparaît, Christine, avec 2 danseurs, 3 musiciens. Et ils partent dans une course folle, avec un plan lumière impressionnant, de la vidéo qui (enfin) sert le concert (et non pas à compenser une médiocre occupation de scène). Une course, oui. Tout va vite. Tout est survolté avant même qu’on ait dépassé le premier quart du concert. Et cela dessert clairement les morceaux et les moments plus lents, plus statiques ; de façon générale, il y a peu de relief à ce concert. On atteint le sommet très vite, on y reste une heure et on redescend tout aussi vite. La construction du set n’y est pas pour rien non plus : L’ordre des chansons est pour moi incompréhensible, incohérent. Mais peu importe, finalement, parce-que ce qui compte c’est de la voir, elle : courir, danser, chanter, chanter en dansant... et oui, je me laisse un peu emmener. Je sens bien le sourire du fond du ventre qui arrive timidement. Mais...il y a cet arrière-goût, vraiment...

Tout sonne comme sur l’album, sans fausse note. Tout est bien calibré, tout tombe bien, comme un beau vêtement « fait main » par une très bonne couturière. Le « fait main » se manifestant entre les morceaux, quand Christine s’adresse au public qui hurle à tort et à travers . Elle donne ça, la fraîcheur, la spontanéité. Encore. Je ne peux m’empêcher de me demander jusqu’à quand, à quel moment la grosse machine calibrée va finir d’écraser ce qui reste de moins formalisé et de sincérité, de chaleur humaine...

Une heure, et puis c’est terminé. La dame à côté de moi se félicite d’être venue. Un beau spectacle, vraiment.
C’est là. C’est ça. Un spectacle. Je suis venue voir, écouter un concert, et j’ai vu un beau spectacle. J’ai oublié la redécouverte de la première fois, j’ai oublié ce qui m’a amené là. On m’a proposé, offert et emmenée, certes, mais je n’ai rencontré personne, vraiment. En sortant, on sent bien que peu importe la ville, le moment, le goût sera exactement le même, le son identique et les paroles, idem.
Alors...alors ?
Alors il est juste question d’attentes, de savoir ce qu’on veut voir, éprouver, écouter. Et si le spectacle était bien, il me manque un concert. Et cela ne tient qu’à moi, ce que je suis, ce que j’aime de la musique et ce que j’en attends. Alors, je garde tout. Quand même. Rien de grave, en somme !

Toutes les photos © Gilles Bertrand

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