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Une histoire aux accents intemporels dans une contexte marqué par l’actualité tragique des migrants aux portes de l’Europe, le tout sous forme d’opéra. Formule originale et vraie réussite pour le film estonien Lisa Limone ja Maroc Orange tormakas armulugu.
Autant le reconnaître tout de suite, je suis assez réticent en ce qui concerne l’animation Estonienne, en bonne partie à cause du denommé Priit Pärn, grand fournisseur d’œuvre abstruses, découvert pour ma part avec la nuit de la carotte et dont je ne goûte guère le style.
Rien d’aussi hermétique en ce qui concerne ce long métrage d’animation, mais au contraire un parti-pris original sur la forme, et une histoire intemporelle, qui entre dramatiquement en résonance avec l’actualité.
La trame de l’histoire – l’amour réputé impossible entre deux êtres que séparent l’origine, l’extraction sociale – ainsi que l’antagonisme (entre les oranges et les citrons) sont des plus classiques. Dans ce cadre assez balisé, c’est la forme selon laquelle se développe l’histoire qui est plutôt bluffante : on assiste à un Opéra de marionnettes, dont le livret (partie en français, partie en italien) est vraiment efficace et finement écrit.
L’histoire est celle d’un jeune migrant arrivant sur les côtes de l’Europe, survivant du naufrage de son embarcations de fortune. La terreur, les rêves, les présupposés des migrants sont présenté avec une dérision distanciée « là-bas, les filles n’ont pas beaucoup de vêtements, mais ce n’est pas parce qu’elle sont pauvres ».
À son arrivée, après quelques démêlés avec la police, le jeune migrant se trouve exploité dans une plantation de tomates/usine de fabrication de ketchup. L’amour entre lui et la fille du propriétaire de cette usine, rêveuse romantique et collectionnant les coquillages musicaux, sera l’enjeu de reste de l’histoire.
L’histoire finit bien, mais là n’est pas l’essentiel. L’animation prouve là encore sa capacité de s’emparer de sujets graves avec tact et empathie. Bravo !