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Auguste Blanqui, ni Dieu ni maître

mardi 22 juillet 2014 par Thierry Saint-Solieux rédaction CC by-nc-sa

Chronique

Dans l’histoire politique de la France, il existe un homme dont le destin peut être rapproché - toutes choses égales par ailleurs - de celui du grand Nelson Mandela. Vous connaissez son nom si, habitant Paris ou visitant la capitale, vous empruntez l’axe qui relie la place d’Italie à la place Denfert-Rochereau et passez par le boulevard Auguste Blanqui !

La province compte elle aussi quelques rues ainsi nommées, moins certainement que pour Jaurès ou Foch. De là à être capable de dire spontanément ce qui vaut à Blanqui cette postérité urbanistique...

C’est le premier mérite de Ni Dieu ni maître, scénarisé par Maximilien Leroy et dessiné par Loïc Locatelli Kournwsky que de remettre en pleine lumière cette personnalité libertaire et socialiste, mais surtout révoltée. Le surnom de Blanqui est pour le moins éloquent :« l’Enfermé » !!! Et mérité : pour diverses atteintes à l’ordre public, il passe plus de quarante années en prison, en résidence surveillée ou en exil.


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Autant dire, plus de la moitié de sa vie ! Le dernier journal qu’il fonde a pour nom Ni Dieu ni maître : une formule qui passe à la postérité grâce au mouvement anarchiste. Marx ou Rosa Luxembourg se réclament de lui, les penseurs contemporains l’admirent, mais ses idées sont-elles viables à l’épreuve du pouvoir ? Impossible de le savoir, lui-même ne l’ayant jamais exercé, et par ailleurs, les exemples abondent de révolutionnaires se muant en dictateurs une fois parvenus au sommet de l’état.

Reste que son parcours force l’admiration, si sa personnalité farouche et ses idées extrêmes peuvent légitimement déranger. L’album s’ouvre par l’évocation d’un moment dramatique - un de plus - dans la vie d’Auguste Blanqui.

Pendant la Commune de Paris, les émeutiers proposent d’échanger un certain nombre d’otages - dont l’archevêque de Paris - contre Blanqui, qui se trouve une fois encore derrière les barreaux, mais le président Thiers refuse. Jugé pour la énième fois, il est lourdement condamné. Pour le prisonnier, le temps passe lentement, occupé à des tâches prosaïques et au travail d’écriture. Un journaliste, Aurélien Mercadet, veut rédiger un article sur lui, mais il est fort mal reçu par Blanqui, fauve blessé et rugissant qui le traite de pisse-papier.

Pas découragé, Marcadet revient chaque semaine en annonçant au vieil homme que son image commence à changer dans l’esprit des gens, on comprend mieux son action, une réhabilitation se dessine. L’armure du guerrier se fend, le vieillard s’adoucit et consent à raconter son parcours.

Il commence à La Rochelle en 1822, avec l’exécution de militants politiques, guillotinés sur la place publique : une prise de conscience pour Blanqui, et le début d’un long chemin. Un chemin qui le voit protester en permanence contre toutes les injustices et les restrictions aux libertés.


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Un chemin périlleux, où il n’hésite jamais à s’engager physiquement, jusqu’à mettre sa vie en péril en prenant les armes pour aider à renverser monarchie aussi bien qu’empire. Tout cela nous est raconté avec une volonté de didactisme, qui ne lasse pourtant jamais, et c’est l’occasion de passer en revue des événements historiques déterminants pour notre pays, avec en guise de ponctuation, des extraits des discours prononcés par Blanqui.

Le dessin est très sobre, voire un peu rude - mais trop d’élégance serait déplacé - avec un jeu sur les couleurs pour différencier les périodes évoquées. Un livre à lire absolument, où les problèmes évoqués sont toujours d’actualité, malheureusement !!!

<cite|livre|titre=Ni dieu, ni maître
|auteurs= Loïc Locatelli-Kournwsky / Maximillien Le Roy
|editeur=Casterman
|annee=2014
|pages=212
|isbn=9782203051577
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Chronique initialement publiée sur Actualitté

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