> Mag > Spectacle > Bartabas redonne vie aux Haras
Depuis bientôt un mois, le bruit des sabots retentit à nouveau sur les pavés des Haras d’Annecy. Et pas n’importe quels sabots ! Loin de Zingaro et des écuries de Versailles, Bartabas crée son nouveau spectacle « Golgota », en collaboration avec le danseur de Flamenco Andrés Marin.
En dehors de ses créations pour le Théâtre équestre Zingaro et pour l’Académie du spectacle équestre de Versailles, Bartabas travaille sur des œuvres plus intimistes dont il est l’auteur et l’interprète.
Parmi ces œuvres, « Le centaure et l’animal », où il joue en compagnie du danseur de butô Ko Murobushi, est présenté à Bonlieu en 2011. A cette occasion, Salvador Garcia lui fait visiter les Haras sous la neige. Bartabas est séduit.
« L’art équestre est un art en voie de disparition ... Il y a une certaine nostalgie à travailler avec les chevaux. On est détenteur d’un savoir qui s’estompe petit à petit ... C’est émouvant, touchant, de réutiliser des installations, un manège, des écuries, qui n’ont plus servi depuis des années ! »
Pas étonnant donc que ce soit aux Haras d’Annecy que Bartabas ait choisi de monter et présenter en première mondiale sa nouvelle mise en scène « Golgota ». L’artiste avec lequel Bartabas a choisi de travailler sur ce projet est l’une des étoiles du flamenco actuel, Andrés Marin, bien connu lui aussi de Salvador Garcia et invité de Bonlieu en 2008.
Pour ces projets très personnels, Bartabas se base d’abord sur une rencontre, une personnalité, avant de réfléchir au thème du spectacle qui en découlera. Bien que passionné de flamenco, Bartabas n’avait jamais osé y toucher avant. Il part dix jours à Séville voir Andrés enseigner son art dans son école. En Andalousie, il visite aussi des églises, beaucoup d’églises, photographie des peintures, grapille des images, des idées ... C’est là-bas que se forme le fond imaginaire du spectacle.
De son côté, Andrés Marin estime que le flamenco a besoin de s’ouvrir à d’autres arts, d’autres formes. Il danse un flamenco épuré, qui va vers l’essence même de cette danse, sans le côté too much. Il chercher à faire avancer son art dans une direction nouvelle, moins traditionnelle. Il accepte avec plaisir de travailler avec Bartabas, qu’il admire pour la relation unique qui le lie aux chevaux et pour ses talents de metteur en scène et de musicien.
La musique a en effet toujours une part importante dans les créations de Bartabas. Il s’agit souvent de musique sacrée, musique qui n’est pas spectaculaire et qui s’adresse à l’âme, tout comme le travail avec les chevaux s’adresse à l’âme.
Les chants grégoriens de Tomás Luis de Victoria, CD découvert par Bartabas à la Rochelle il y a 4 ou 5 ans, étaient restés dans sa bibliothèque, en attente du bon moment. Ils ont naturellement trouvé leur place dans ce spectacle. Arrangés pour une voix et une guitare, ils rappellent les sonorités du flamenco. Interprétés par un contre-ténor, un cornet et un luth, ils mettent en valeur le rythme de la danse et celui des chevaux.
Bartabas et Andrés Marin s’entendent très vite sur la manière de travailler, le placement, la musique, la lumière ...
En résulte un spectacle en clair-obscur, construit comme une cérémonie, où tout est à vue. Les images se forment devant le spectateur. Un jeu de couleurs, rouge, noir, blanc, de sons et de musique, souligne les prestations du danseur et des chevaux.
Contrairement au spectacle « Le centaure et l’animal », où se succèdent des scènes équestres et des chorégraphies de danse butô, on assiste avec plaisir dans « Golgota » à un véritable échange, une vraie interaction entre le danseur et les chevaux.
Même si Andrés Marin dit avoir été très impressionné par la prestance des chevaux au départ, une réelle complicité a vu le jour.
De même, les chevaux, surpris par les gestes brusques du flamenco, ont appris à les apprivoiser, au fur et à mesure des répétitions.
La relation de crainte du départ s’est muée en une adoption bilatérale, au point que le danseur commence à pied derrière le cheval en le tenant par la queue.
La majeure partie du spectacle, Andrés Marin danse pieds nus dans le sable noir. Ce contact danse-terre donne à son flamenco une autre dimension, plus intéressante, moins ancrée dans le sol, plus en suspension. D’ailleurs, la seule fois, ou presque, qu’il danse en bottes, sa chorégraphie s’achève sur une note tout à fait inattendue ...
A cet instar, et malgré son thème, « Golgota » est rempli de clins d’œil et de touches d’humour.
Pour parfaire le tableau, ajoutez un nain aux talents multiples, un âne et une crucifixion (le spectacle ne s’appelle pas Golgota pour rien ...) et vous obtenez un spectacle à ne rater sous aucun prétexte !
La nouvelle création de Bartabas, présentée en première mondiale à Annecy.
Les dimanches 13 et 20 à 17h.