> Mag > Musique > Blanche, glacée…en vie ?
Evidemment, une fois que le cœur est pris, encore faut-il entretenir la flamme. Je dois dire que je suis plutôt indulgente, une fois conquise, je suis prête à pardonner quelques faux pas. Mais il arrive que la déception se pointe et finisse par s’imposer. Alors, c’est comme un chagrin, un voile tombé entre l’artiste et moi.
Le 6 février dernier, je suis allée voir Emily Jane White en concert au Brise Glace, à Annecy. J’avais hâte, vraiment, surprise et ravie de voir qu’elle passait là, n’ayant pas eu écho d’une tournée en cours...
Pourquoi ? Parce-que j’écoute Emily Jane White depuis Dark Undercoat, son premier album et parce-que sa musique a un réel effet sur moi...en l’écoutant, disons que je parviens à me défaire des crispations et à... « conclure les gros dossiers en cours ».
A partir de là, le fait que je ne parvienne pas à écouter Blood / Lines (dernier album, sorti en 2013) dans son intégralité, en une seule fois, ne constituait pour moi qu’une petite erreur de parcours. Pas bien grave, vraiment...Et même en sachant qu’il allait être question de cet album pour ce concert au Brise-Glace, je ne me doutais pas une seconde de l’issue de cette soirée...
Et non. Je veux dire...Que c’était dur. Dur, difficile, vraiment...pourquoi ? Pourquoi faire ça ? Je ne comprends pas, je reste à la porte, jusqu’aux dernières minutes du concert.
Le concert s’ouvre sur Emily Jane et son batteur. À deux, ils débutent par « Keeley », accompagnés d’une vidéo qui ne servira que pour ce morceau - par la suite, pendant tout le set, on pourra contempler les arbres (figés) d’une forêt en contre-plongée. Il y a d’emblée le son du clavier qui envoie ces nappes sonores, tout au long du concert (ce sont les mêmes qui m’empêchent d’écouter l’album d’une seule traite...), donnant à l’ensemble un côté new-age, passant alors une bague de plomb au doigt de ce concert.
Dans des lumières froides la plupart du temps, Emily Jane chante en fermant les yeux, l’air pénétré ou totalement neutre. Sa voix est belle, certes, mais tellement éthérée, et le registre lexical, identique d’un morceau à l’autre...
Je dois dire : J’ai tenté d’ignorer tout ça. Ce n’est pas grave, j’avoue que j’ai tenté de laisser tout ça de côté. Mais le second, le troisième morceau ne font que me mettre l’évidence à l’oreille : Le concert, excepté à quelques moments lumineux, n’est que cela. Un bloc sans relief. Tout le reste du set aura le même goût.
J’ai fermé les yeux. J’ai essayé de me laisser aller, bouger lentement, j’aimerais entrer, mais rien à faire. Écouter cela debout m’épuise, je finis par aller m’asseoir. J’ai dû mal comprendre...
On peut voir Emily alterner, guitare, clavier ; nous saluer gentiment de sa petite voix entre les chansons...mais tout est tellement calme, éteint, morne...long. Rien ne dépasse, et j’ai l’impression de couler dans de l’eau glacée, toucher le fond et regarder vers la surface, la lumière altérée...
Et puis, lorsque les première notes de « Liza » (morceau de Victorian America) sonnent voilà que tout reprend vie, tout se réchauffe.
Immédiatement, dans la salle, on se redresse, on se tend vers elle. Elle nous montre (je me suis posé cette question) qu’elle n’a pas besoin de soutien d’autres instruments pour emmener le public, pour occuper cette scène, puisqu’Emily rayonne. Enfin. Comme un sursaut de vie. Avant de retomber encore, un peu, lentement...
A la fin du set, Emily est prête à rester sur scène, mais ne sait pas quoi chanter : sagement, elle a exécuté tout le set prévu. Quelqu’un lui propose « Hole in the Middle ». Chaleur, vie, lumière à nouveau. Il aura fallu attendre les 4 dernières minutes du concert pour voir avec soulagement que tout est là, caché, endormi, mais bien vivant.
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