> Mag > Musique > Comme un seul homme
J’avais entendu parler de The Legendary Tigerman - one-man band originaire du Portugal, il y a quelques années, sans prendre la peine d’écouter ce qu’il faisait, comment il le faisait ni ce que cela me faisait.
J’ai vu sa photo, son visage, de loin dans un magazine, à la sortie de True, son dernier album. Ah tiens...
Je vais encore parler de moi. Mais je vais essayer d’aborder la montagne par un autre flanc… Des artistes me plaisent. Directement et sans prendre de précautions, vite et fort. D’autres me tournent autour. Ils approchent doucement, puis sans en avoir l’air, s’installent dans un recoin oublié de mon oreille et instillent leur musique tout doucement, comme on chuchote. Ils prennent le temps de me convaincre. Un jour, un après-midi, je sais qu’ils m’accompagneront. Longtemps.
J’ai donc vu, d’abord, le visage de Paulo Furtado, The Legendary Tigerman, en noir et blanc sur son album True. J’ai voulu voir ensuite, comment il sonnait, si sa voix pouvait me convenir, si elle me tirerait de là, pour un moment. Les trois premiers morceaux m’ont plu, comme un amusement ou une première tentative - celle qui te dit qu’il n’y a pas de danger à aller un peu plus loin.
C’est du rock, du comme j’aime, avec plein de delays, des riffs, un parfum rétro au charme incontestable. Oui c’est bien, je me dis, pas mal, mais je reste au bord avec l’aplomb des blasés, je sais que tout un album de cette teneur me fera certainement décrocher avant la fin.
Et alors il y a « Wild Beast ». J’écoute au casque et c’est là précisément qu’il me fait tituber, avec sa voix basse comme un avertissement, les saccades, le delay encore et la tension souterraine jusqu’au bout. Une fois, deux, trois, encore, je goûte encore ; c’est lui qui est en train de gagner et cette chanson me reste dans le ventre durant les heures qui suivent.
Il a trouvé le recoin, voilà, il va s’installer... je sais, mais j’interromps l’écoute. Je reviendrai plus forte, après, libérée de cette petite faiblesse.
en écoutant l’album un peu fort, dans une grande pièce. J’attends « Wild Beast », mais étrangement, ce sont les autres morceaux qui sortent éclatants et captent toute mon attention...et je reste debout à plusieurs reprises, immobile, à écouter, à constater que ce qui me traverse ici est cette sensualité incroyable, qu’on retrouve tout le long de l’album.
Essaie de rester impassible sur « Dance Craze », de ne pas sentir la force au fond de ton ventre qui se déploie dans tout ton corps sur « Twenty first century Rock n’ Roll » ; essaie de rester froid en écoutant « Do come home »… essaie juste, je serais curieuse de voir ça !
Alors maintenant, disons...disons que je ne connais rien. Je ne sais rien lorsqu’une voix me parvient, parvient à me séduire comme ça, je suis incapable de dire : « c’est comme untel ou tel autre ».
Une fois que j’ai cédé et que je sais de façon ferme et définitive que j’aime un artiste, souvent, je ne cherche rien. Je ne guette pas de trace sur internet pour voir...je reste volontairement dans mon ignorance, pour garder encore, plus loin, toutes les images que la musique a pu faire naître ou alors esquisser en moi. Et c’est juste ça que je lui veux à ce Legendary Tigerman…c’est ce qu’il sera capable de me faire…et là, chaque chanson, chaque morceau de l’album est une invitation à se rapprocher doucement de l’Inconnu, avec nonchalance (« I’m on the Run », « Love Ride ») ou au contraire une urgence délicieuse (« Gone ») nourries de la ferme intention de céder à tous ces désirs-là.
Chaque chanson me donne de ces histoires de rencontres, enterrées peut-être, impossibles certainement, mais dont la beauté est incurable. C’est rare, c’est fragile et j’en veux encore.
Voilà. True, dernier album de The Legendary Tigerman me fait ça.
Portfolio capté il y a presque 10 ans, au ZdB, un petit lieu à Bairro Alto(Lisbonne), où l’artiste s’est produit à plusieurs reprise le jour de Noël
One man Band Rock Garage
10€
1re partie : King automatic (blues rock)