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mercredi 25 mai 2011 par Pas de licence spécifique (droits par défaut)
ReportageJe vais vous parler d’un lieu magique, un de ces lieux dont on sort amoureux ; du Mexique bien sûr… Cet endroit se nomme “El Amigo” et son nom, il le porte avec bonheur.
Imaginez que vous entrez dans ce que vous pensez être un bar-restaurant et que vous découvrez avec surprise un lieu de vie collective, où effectivement on mange, on boit, mais où surtout on partage.
Les familles sont assises autour de grandes tables, les plus petits sur les genoux des plus grands, les rires raisonnent dans ce qui me semble être un ancien hangar.
La musique typique est au rendez-vous. Les hommes saouls, réunis autour du juke-box, réclament leur chanson d’amour. D’autres dorment sur les tables, après y avoir été un peu fort sur l’alcool.
Il est quatre heure de l’après-midi, la salle est pleine.
Je suis en compagnie de Carlos, qui voulait me faire découvrir les lieux.
Ici, je suis la seule étrangère et ce n’est pas déplaisant.
Pour commencer, il est nécessaire de commander deux bières, car une achetée, une offerte… Puis arrivent avec elles les plats, qu’on n’a pas commandé.
C’est normal. Ici pas de cacahuètes, mais des tacos ; de la viande qui continue à cuire sur la table grâce au petit four à bois en brique qui l’accompagne. Des petites tasses arrivent peu à peu, avec des soupes (crevettes, bouillons…)…Puis vient le guacamole…Puis arrivent des petites salades fraîcheurs, des antojitos de toutes sortes !
Tout est délicieux, on n’en voit pas le bout…
Et alors que nous réussissons à terminer les nombreux petits plats qu’il y a sur la table, il en arrive le double en même temps que le débarrassage.
Je n’en crois pas mes yeux, on n’a rien payé, rien commandé d’autre que deux bières, et il y a une carte disponible pour si après l’apéro (qui s’avère être un véritable festin), l’envie de manger un plat vous prend...
Pour ma part, j’étais enchantée. La musique est forte, les gens parlent, échangent de tables en tables, l’ambiance est chaleureuse, les serveurs sympathiques.
On est bien au Mexique pour quarante pesos ; c’est-à-dire moins de trois euro… À deux !!!
Les hommes viennent pour boire. Plus ils mangent, plus ils peuvent boire. Des tables sont entièrement recouvertes de bouteilles vides, laissant à peine la place à la tête qui veut s’y poser pour dormir un peu…
Les familles se réunissent ici le dimanche après midi autour d’une grande table pour échanger et laisser jouer les enfants pendant que tous trinquent et se régalent.
Résonnent en fond les chansons tristes “norteñas”, celles qui nous racontent des histoires de narcos, de problèmes de la vie quotidienne, et surtout d’amours perdus. Le tout sur le ton de l’humour, le son de l’accordéon et un rythme entraînant.
Cette ambiance, on la trouve un peu partout, cette joie de vivre, ce quotidien toujours baigné par la musique, qui donne au Mexique une richesse bien plus grande que celle que pourrait lui donner toute forme d’économie comme la nôtre, froide et individualiste.
Ici, beaucoup de gens se contentent du plaisir de bien manger, de rigoler, et d’écouter un bon groupe de musique en famille. Parfois je me dis que seuls les pauvres savent réellement profiter de la vie.
Si la maison n’est pas, et de loin, le lieu privilégié de la famille, (dans la mesure où comme on peut se l’imaginer, ce n’est pas du plus haut confort), la rue, et tous les lieux publics font partie intégrante du quotidien de chacun.
Je sens que l’espace commun ici l’est réellement. La rue, du matin jusqu’au bout de la nuit, appartient à tous. On y fait un peu ce qu’on veut et tout le monde en profite.
“El amigo”… C’est un lieu qui fait partie de ceux qu’on ne peut trouver qu’en compagnie des locaux, et qu’on ne peut apprécier qu’en comprenant et en parlant la langue. Toute cette jolie description pour traduire une idée importante, quelque chose que j’ai compris : je crois qu’il faut du temps pour découvrir un pays, car on ne tombe pas sur ce genre d’endroit et l’on ne ressent pas ce que j’ai ressenti là-bas en passant deux ou trois jours par ville, et deux ou trois semaines par pays… !
Voici ma vision du voyage, celle qui dit que je n’ai pas besoin d’avoir vu tous les plus beaux paysages pour avoir vu le Mexique. D’ailleurs, si je les avais tous vus, ils me seraient sûrement passés à côté.
NDLR : Lou ne donne pas l’adresse évidemment : on n’est pas le Guide du Routard !