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En nous la vie

vendredi 22 novembre 2013 par Fraise Cinnamon rédaction CC by-nc-sa

Compte-rendu

Après avoir interviewé Joseph D’Anvers à Paris, la bloggeuse marseillaise Fraise Cinnamon s’est arrêtée à Annecy, où Arman Méliès et La Maison Tellier ont fait font affiche commune, ravie de profiter de l’occasion pour des interviews… Elle nous livre son coup de cœur.

J’arrive à la salle en début d’après midi et découvre un lieu atypique, le Brise-Glace. Véritable plaque tournante des musiques actuelles, cet endroit chaleureux (malgré le climat régional !), mené par une équipe impliquée et fort sympathique, propose moultes activités à un public de tous âges. Des locaux de répétitions aux concerts, des formations aux partenariats avec les réseaux culturels, bref, un lieu qui compte. Leur dernière idée, brillante : proposer à La Maison Tellier de jouer devant des enfants ! L’après-midi du groupe est donc chargée, m’obligeant à attendre avant de leur poser mes questions… Je m’installe alors bien sagement dans un coin de la salle, et assiste avec délectation aux balances d’Arman…

Après les deux interviews il est rapidement l’heure du concert et je trépigne d’impatience devant la salle, ignorant le froid polaire de ce début de soirée savoyarde. Le public, tout aussi pressé, s’agglutine devant l’entrée et les portes s’ouvrent enfin.

C’est La Maison Tellier qui commence

et je ne les ai encore jamais vus en live. « Beauté Pour Tous » m’a déjà mis une sacrée claque, alors autant dire que je les attends au tournant… Dès leur arrivée sur scène, le ton est donné : simplicité et générosité. Les gaillards s’offrent entièrement à travers leur musique, nous livrent leurs chansons avec humour, amour, passion, et je retrouve avec bonheur toute l’authenticité de leurs disques. En vrai, en live, devant moi. Je fonds. J’ai envie que ça dure toujours, j’ai envie d’aller y habiter, moi, dans ce bordel normand. En plus il y a une fête foraine dans leur jardin, un vrai paradis… C’est ça l’effet LMT.

Des musiciens tous différents mais en osmose complète, chacun apportant sa pierre à l’édifice, magnifiant cette musique déjà si riche. Helmut, le chanteur, s’abandonne au service des mots, ses propres mots, qu’il nous sert avec une intensité rare. Porté par les autres musiciens, qui, chacun à sa manière, subliment le spectacle. La délicatesse feutrée du trompettiste, la discrétion de l’indispensable contrebassiste, l’implication acharnée du guitariste, la folie du batteur… Tiens, parlons-en du batteur. Survolté. Torturé. Il emmène le public dans sa transe, meneur enragé, dévoilant ses tripes à coup de hurlements tonitruants, offrant plus de profondeur encore à ce spectacle envoûtant. Je me demande ce qui l’attend à la sortie, la civière ou la camisole…

Encore éberluée par la puissance de ce show, je reconnais soudain le début de ma chanson préférée, « La Maison De Nos Pères ». J’en souris de bonheur et m’abandonne, les yeux fermés, à la joie d’être là. Au premier rang, accrochée à la barrière, je vis ce que je pense être à ce moment-là l’apothéose du concert, mais je me trompais. À ma grande surprise c’est « Petit Lapin » qui m’emmène loin, très loin, au bord des larmes même, je vous assure…
Épatée, transportée, je les regarde s’en aller sur « Mauvais Coton », un final tel je l’imaginais sur le disque, chaleureux et captivant. Bonne route, les gars, revenez vite…

La salle se rallume sur un public ravi (bien que frustré de ne pas avoir eu de rappel), moi je vais m’assoir un moment pour attendre la suite et me remettre de mes émotions. Je ne tarde pas à aller retrouver ma place devant, car voilà…


Arman qui pointe un minois timide et discret,

branche sa guitare et entame une mélopée planante et torturée. Ses musiciens le rejoignent et la boîte à bijoux s’ouvre enfin, livrant au public les joyaux dont il a le secret. Plus près de la scène que jamais, j’ai tout le loisir d’observer la manière dont ils abordent ce concert. Étrange d’avoir assisté aux balances et de voir ensuite le résultat en public…

Je retrouve avec amusement l’application presque scolaire de Pacôme, le clavier, sur des back vocals parfaites qui habillent à merveille l’univers d’Arman. Tout est là, la froideur des sons électroniques enveloppés dans les bras tortueux de sa guitare, le grondement perpétuel qui vient prendre les tripes à chaque morceau, la chaleur et la tendresse de sa voix si touchante parfois… Il se donne, s’oublie, offre au public cette musique si prenante, si précise, si ensorcelante. Précise, oui, car Arman est un orfèvre de la mélodie. Ses morceaux sont ciselés, ficelés, taillés comme des pierres précieuses. Il nous rend à travers eux, au centuple, son amour pour la musique.

Et moi, en face, je suis envahie d’émotions, plus fortes les unes que les autres. Le point culminant bien sûr est « Sylvaplana », deuxième fois de la soirée que je me retrouve au bord des larmes. Je ne sais pas si je vais tenir le choc longtemps. Toujours cette impression, troublante et fascinante, que le plafond va exploser et nous envoyer dans une autre galaxie…

Arman nous laisse dans cet état et s’éclipse sous les applaudissements incessants, pour mieux revenir nous donner encore un peu de lui. Il en plaisante, cette histoire de rappel faussement imprévu le fait sourire, on sait tous comment ça marche… La fin du concert est délicate, moelleuse, comme pour mieux nous faire aborder la nuit qui va suivre. Mon cœur s’emballe sur les dernières notes, comment vous dire à quel point je n’ai pas envie que cette soirée se termine… Je rejoins malgré tout la sortie et retrouve mon hôtel, des étoiles plein les oreilles.


Ce soir mon cœur a tremblé, mes yeux ont pétillé, le Brise-Glace a fondu. La chaleur du foyer Tellier et du trio Méliès a repoussé un peu l’hiver précoce, me faisant espérer que vite, très vite, je les retrouverai à nouveau au coin du feu.

Article initialement publié sur le blog La fraise cinnamon

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