> Mag > Musique > Le silence de l’exode
Yom est sans nul doute un artiste intergalactique en provenance directe de la planète « klezmer » !!
En effet, ce clarinettiste virtuose s’est très rapidement tourné vers les musiques juives d’Europe de l’Est et d’Europe centrale en s’inspirant des plus grands (Naftule Brandwein, Giora Feidman entre autre…) et de la virtuosité inhérente à ces musiques à la fois festives et nostalgiques. Ce son particulier — qui fait que cette musique vous amène dans des états de joie, tristesse, gaité, et nostalgie — provient de la gamme klezmer et de sa fameuse seconde augmentée qui ajoute cette sensibilité si spécifique.
La clarinette, instrument très proche en fréquence de la voix humaine, exalte alors de ces notes presque chantées qui, avec Yom, prennent toutes leurs forces. Il n’est pas rare d’entendre dans cette musique et surtout dans le son de la clarinette aussi bien des rires, des cris, que des voix éraillées ou écorchées, bref, des chants qui en font toute son histoire.
Après plusieurs albums traditionnels riches de recherches au plus profond de ces musiques ancestrales, parfois en duo [1], Yom a poursuivi sur des albums plus éclectiques mêlant musique traditionnelle et musique électro, particulièrement réussis et vraiment hypnotiques (The Empire of Love, With Love…) pour arriver aujourd’hui à ce qu’il appelle lui-même une musique d’inspiration klezmer dans le silence de l’exode.
Cette pièce musicale est un tout, on l’écoute sans interruption, et on vit un vrai voyage. Reprenant l’histoire de l’exode des juifs pendant 40 ans dans le désert, ce voyage musical où la clarinette de Yom prend tout son sens pour nous faire partager toutes les étapes d’un voyage. On y trouve également les percussions iraniennes de Bijan Chemirani, la contrebasse de Claude Tchamitchian et le violoncelle de Farid D. Cette formation prend toute sa mesure pour exprimer le son d’un exode, où tout du moins son histoire…
En écoutant ce « silence » on ressent tout d’abord une alchimie parfaite entre ces 4 musiciens si bien choisis par le compositeur, et on embarque dans un voyage, celui qui a inspiré Yom —mais pourquoi pas le nôtre, peu importe, et c’est ça la force de cette composition. On y trouve alors toutes les étapes d’une aventure : du départ à l’excitation des premières étapes, les moments difficiles, l’épuisement, la survie, l’espoir et les moments de bonheur et de délivrance à l’arrivée.
Tout y est, et l’inspiration klezmer y est pour beaucoup, mais ce qui fait la force de cette musique ce sont toutes ces inspirations notamment orientales qui y sont associées : le son de la clarinette en sol de Yom qui rappelle celui du duduk, flûte arménienne ancestrale, le violoncelle qui devient oud, la contrebasse qui scande l’épopée et enfin les percussions iraniennes comme un rythme de marche qui nous tiennent et nous guident tout au long du voyage…
Ces quatre aventuriers nous feront passer un moment absolument unique et déconnecté du moment présent, et ce n’est pas pour rien qu’André Manoukian a souhaité les faire jouer en pleine nature, dans un de ses voyages cosmiques en vallée de Chamonix dans le cadre du Cosmo Jazz festival 2015 pour le plus grand bonheur des montagnes et de ses amoureux.
Clarinette-hero
Replis salle Olca
[1] avec le pianiste Denis Cuniot par exemple, ou plus récemment le joueur de Guimbarbe Wong Li