> Mag > Musique > Shilpa Ray, tantôt capitaine, tantôt sirène…
Le Brise-glace, par définition, est à son aise dans l’élément marin. Tant mieux, car en ce vendredi soir, c’est en vraie capitaine de navire que Shilpa Ray prend les commandes du vaisseau et impose son cap, d’une main ferme et résolue.
Sortie des brumes d’une soirée encore indécise, partagée entre les nébulosités atmosphériques, parfois orageuses, de Joy Angst et le timbre solaire, paisible, de Aldous Harding, elle offre avant tout un spectacle d’un réelle intensité visuelle.
À la tête d’une bande de matelots que rien ne peut troubler, habitués qu’ils sont à fendre les vagues, bercés par le roulis, Shilpa Ray s’active à la manœuvre, engageant tout son corps dans un effort où le souffle de l’harmonium indien se mêle à celui d’une voix où chaque son, comme dirait Nietzsche, est le résultat d’une « fête musculaire ».
En meneuse de troupes, Shilpa Ray s’active sans relâche, et pilote la machine vaporeuse depuis plusieurs instruments, ordonnant parfois l’ébranlement, ou imposant le calme. Le tout dégage une impression de puissance impeccable, et offre le contraste d’une énergie imparable, quoique presque immobile, tant le mouvement y paraît naturel. Au cœur de cette traversée, les accents rauques et puissants de cette voix autoritaire alternent avec des notes plus claires, hypnotiques, suspendues, qui laissent deviner la nature de sirène de ce brin de capitaine.
Qu’elle soit l’une ou bien l’autre, Shilpa Ray nous fascine, nous embarque avec elle dans un océan riche de repères mélangés, où des échos d’ailleurs et d’autrefois font entendre un son neuf, dans le bruit étonnant de ce voyage singulier. Après le passage d’un tel équipage, tous les sens, agités, restent pour longtemps en éveil…
Toutes photo pour le Brise-Glace par P. Rinaudo