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Traque au vampire british

mercredi 19 novembre 2014 par Thierry Saint-Solieux rédaction CC by-nc-sa

Compte-rendu

Le troisième et dernier volume de la série D sonne comme un adieu, à plus d’un titre. Un adieu à cette histoire de chasse aux vampires dans l’Angleterre de la Reine Victoria, qui est un bel exemple de série grand public réalisée avec soin, et dont la qualité reste constante jusqu’à son terme.

Et un adieu à son dessinateur, Bruno Maïorana en tant qu’auteur de bandes dessinées, qui déclare stopper après cet album toute activité dans ce domaine ! Exigeant et perfectionniste, il ne peut plus vivre de son travail dans un marché BD saturé et déboussolé.

Une triste décision à mettre en regard de la lettre ouverte adressée récemment à Madame la Ministre de la Culture Aurélie Filippetti au sujet des cotisations retraite et des droits numériques, et signée par des centaines de ses confrères. Affaire à suivre, et retour au Neuvième Art en attendant...

D est l’oeuvre d’un trio : Alain Ayroles au scénario, Bruno Maïorana au dessin, et Thierry Leprévost à la mise en couleur, déjà signataires tous ensemble de l’excellent Garulfo chez Delcourt, pastiche féerique nappé d’une sauce à la Tex Avery. Tout au long de l’intrigue, nous suivons l’aventurier Richard Drake - un décalque du légendaire Richard Burton, découvreur des sources du Nil - dans son exploration de la société britannique période victorienne, depuis les bas-fonds jusqu’aux salons les plus chics, à la recherche de vampires.

D’abord incrédule, Drake admet leur existence lorsque Lady Catherine Lacombe, la jeune femme dont il est tombé amoureux, est directement menacée. Rencontrés au fil des épisodes, Lord Faureston et Lady d’Angerès sont différentes incarnations d’un même mal, qui répugne Dick Drake autant qu’il le fascine !!!

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Car depuis sa participation à un rituel sanglant, au coeur de l’Afrique noire,il ne peut s’empêcher de se poser des questions sur les troubles pulsions qui l’agitent... D puise ses références dans les romans « gothiques » de Bram Stoker, Ann Ryce ou Sheridan Le Fanu, des oeuvres où l’on trouve les origines littéraires du mythe du vampire, et qui par ailleurs en disent long sur les moeurs, et les désirs refoulés par les hommes ou les femmes à l’époque de leur rédaction.

Notre trio d’auteurs BD cultive quant à lui une esthétique évoquant irrésistiblement les films que réalise Terence Fisher pour le compte de la Hammer Films dans les années 60, soit un mélange d’élégance et d’animalité bien dosé. Ayroles et Maïorana y ajoutent une pointe d’humour avec le personnage de Jones, employé de banque poursuivant les vampires afin d’assouvir une vengeance personnelle, un personnage un peu ridicule, mais en fait plus trouble qu’il ne semble de prime abord !

Monsieur Caulard vient aujourd’hui conclure avec bonheur la trilogie D, en apportant son lot de surprises destinées à relancer l’intérêt. Caulard est un magnat dans le domaine de la presse et de l’industrie, souhaitant financer les voyages de Richard Drake : autant dire un capitaliste qui, symboliquement, suce le sang de ses employés pour s’enrichir.

Symboliquement seulement ? Ayroles nous lance ici sur quelques fausses (?) pistes, qui obligent à se replonger dans les volumes précédents pour mieux apprécier l’intrigue dans son ensemble. Quant à Maïorana, il peut s’en donner à cœur joie dans la représentation de la ville tentaculaire et de ses usines, avec une parfaite lisibilité et une grande élégance, malgré des cases fort chargées : bravo, l’artiste !

<cite|livre|titre=Monsieur Caulard
|auteurs=Alain Ayroles (Scénario),
Bruno Maïorana (Dessin), Thierry Leprévost (Couleurs)
|editeur=Delcourt
|annee=2014
|collection=Conquistadors
|tome=3
|pages=64
|isbn=9782756034140
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Chronique parue précédemment sur actualitte.com

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