> Mag > Écritures > Baby Jane à la bib’ de Lyon
Un roman sur les lesbiennes et le trouble panique : voilà ce que l’écrivain estonienne Sofi Oksanen est venue présentée aux Assises internationales du roman de Lyon. Un Baby Jane tout aussi frappant que ses autres livres...
Ses personnages vivent autant dans l’ombre qu’elle est médiatique : ce 22 mai, l’écrivain Sofi Oksanen, qui a déjà fait découvrir les sombres tréfonds de l’âme estonienne au public français avec Purge ou encore avec Les vaches de Staline, est arrivée aux Assises internationales du roman de Lyon, avec ses dreadlocks mauves et ses escarpins vermillon. Comme sur les photos de presse. Mais à l’approcher, on lui découvre la réserve de sa myopie et un soin appliqué à expliquer sa pensée et son œuvre.
Cette œuvre dont elle parle, ce jour-là, à la bibliothèque de La Part-Dieu, est ancienne pour elle, mais nouvellement traduite en France : Baby Jane avait été commencé en 2000 en tant que pièce de théâtre, stoppé puis repris sous forme de roman. Aujourd’hui, il paraît, traduit du finnois en français, chez Stock.
Au cœur de ce livre, deux sujets forts : l’homosexualité féminine et cette maladie mentale qu’est le trouble panique. « Mon intérêt pour la folie vient de mon métier : celui d’écrivain, pour une femme, a longtemps été considéré comme une forme de folie… ». Le ton est donné : si elle réfute tout idéologie, Sofi Oksanen affirme « poser un acte politique » dès qu’elle prend la plume. Ses centres d‘intérêt : tout ce qui est « invisible » », soit ici la « micro-histoire » de la communauté lesbienne, transmise plus ou moins oralement, et qui n’apparaît pas dans la « grande » Histoire, ainsi que ces femmes victimes d’une vindicte irrationnelle sous prétexte qu’elles sont lesbiennes et qui s’enferment peu à peu chez elles, comme son héroïne, jusqu’à être incapables d’en sortir. « Pas sûr qu’on ait tiré les enseignements du sida… », lâche l’écrivain.
Sofi Oksanen assure avoir écrit Baby Jane surtout « pour que quelque chose sur ce sujet soit écrit en Estonie ». Une Estonie où il manque tellement de mots pour décrire les subtilités et la complexité de la sexualité que la traduction de 50 nuances de grey de E.L. James avait posé problème… Le Français est sans doute plus riche en vocabulaire mais il a souvent jeté, lui aussi, des voiles pudiques sur les réalités décrites par ce roman. Bienvenue, donc, Baby Jane !