> Mag > Musique > La Tène : danse avec les pierres
La Tène revient avec un nouveau disque habillé d’un travail graphique magnifique, Ecorcha / Taillée — La Tène ou la rencontre du minimalisme et d’une inspiration tirée des musiques traditionnelles ancestrales.
Il faut déjà pouvoir se les avaler, ces morceaux. En prendre la mesure, en saisir l’envergure et se mettre au diapason. Quatorze minutes l’un et plus de dix-huit pour l’autre. Et quand on sait qu’ils sont principalement basés sur la répétition inlassable de motifs minimaux, on comprend que la proposition du trio formé par Alexis Degrenier et les Genevois Cyril Bondi et D’incise, augmenté de Jacques Puech à la cabrette, Louis Jacques à la cabrette et cornemuse 23’’, Guilhem Lacroux à la guitare 12 cordes et Jérémie Sauvage à la basse, n’est pas tout à fait commune, pas exactement pop.
Le disque est donc composé de deux longues pièces, deux paysages sonores à coloration lente, à métamorphose progressive. « L’Ecorcha » s’ouvre sur une scansion lente d’accords tendus, qui vont graduellement s’adoucir, dériver et gagner en chaleur. Par comparaison, « La Taillée » a immédiatement des airs de tube dansant et ondulant. Ses accords stridents vont eux-aussi s’ouvrir et se déployer lentement pour aboutir, après un long break percussions et basse, à un final ennivrant, éclatant d’énergie et de joie.
La formule de La Tène pourra paraître aride. Elle laissera certain(e)s perplexes, repoussera peut-être, même. Mais elle force à prendre du recul, à mettre de côté ses attentes pré-formatées pour appréhender ces pièces dans leur entièreté, leur étrangeté, et les laisser nous raconter ce qu’elles ont à nous dire. Se laisser envoûter par cette matière sonore rugueuse, faire l’expérience de son altérité, de la folie infusée dans ces harmonies troubles, et sentir toute la force d’évocation dont elle est capable.
La Tène, « Ecorcha/Taillée » LP (les disques Bongo joe, février 2023)