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Château Rouge & Black Light

mercredi 16 novembre 2016 par Jean-Pierre Biskup rédaction , Lionel Fraix rédaction CC by-nc-sa

Ibrahim Maalouf était en concert à Château Rouge à Annemasse le mercredi 2 novembre pour présenter son album Red & Black Light. Concert complet, archi complet, avec beaucoup de musiques et de lumières pour un véritable show pouvant toucher un large public tout en proposant de la musique riche, savante, intéressante, et accessible. Ibrahim Maalouf, un concert de ouf !

Une musique lumineuse

Pas besoin de présenter Ibrahim Maalouf aujourd’hui, le trompettiste a vu sa notoriété dépasser le cercle du milieu du jazz. Désormais sa médiatisation est large avec des grands titres de presse, la télévision, le cinéma... Je suis tenté de dire que tout le monde (ou presque) en parle...

Actuellement, Ibrahim Maalouf présente ses deux derniers albums en tournée : Kalthoum dédié à la grande chanteuse Oum Kalthoum, et Red & Black Light avec de nouvelles compositions.

Ici on est face à l’album Red & Black Light qui se présente comme un hommage aux femmes qui sont essentielles selon le musicien. C’est en particulier un hommage aux femmes de sa famille qui lui ont permis d’avoir un équilibre durant sa vie, notamment dans une période difficile de chaos, guerre et exil.
Globalement, l’album a des allures pop et electro, avec l’abord de différents styles allant du rock aux musiques du monde avec en filigrane la présence subtile mais essentielle du jazz.

Plus qu’un concert, un vrai show

La foule, ou plutôt les foules (l’une ayant déjà ses billets en mains, l’autre cherchant à retirer ses places réservées), s’amasse(nt) devant les portes du château musical aux couleurs rouges et noires pour ce soir. Pas la peine de venir acheter une place au guichet à ce moment-là, le concert est déjà complet et archi complet depuis longtemps...

Ouverture des portes, c’est la guerre un concert de Maalouf, c’est « Beirut » (référence à un titre marquant dans la discographie et la carrière du musicien). Jouant un peu des coudes, on peut arriver à rentrer et à s’installer. Tous les sièges semblent occupés, la fosse est pleine... Le public est au rendez-vous.

Pour commencer et chauffer un peu la salle qui est déjà prête à s’envoler avec Ibrahim Maalouf, il est proposé une première partie assurée par un duo de musiciens multi-instrumentistes jouant aussi avec des machines pour un corps à corps entre humain et ordinateur : Humano a Mano. Utilisation d’instruments, voix, samples en direct, on sent de l’impro au milieu de compos voguant entre jazz, musiques du monde, rock, electro. Cela sonne parfois expérimental, mais ça ne semble pas désarçonner le public. Le set n’est ni trop court, ni trop long, cela donne un aperçu d’un duo qui mérite d’être écouté et vu avec plus d’attention et de temps pour s’en faire une idée plus précise. En tout cas, l’accueil a été bon, mission accomplie pour ouvrir la soirée.

Changement de plateau... Quelques instants... De l’obscurité et de la lumière... Voilà, le concert d’Ibrahim Maalouf va enfin commencer. Jeux de lumières éclatantes et variées, la part belle sera faite à l’album Red & Black Light. On découvre un Ibrahim Maalouf ne se contentant pas de simplement jouer de la trompette. Le musicien s’éclate aussi avec les claviers, un piano aussi parfois, tout en étant entouré d’une équipe de choc et de divers invités. La formation de base est composée donc de trompette (Ibrahim Maalouf), claviers (Eric Legnini, Frank Woeste, Ibrahim Maalouf), guitare électrique (François Delporte), basse (Antoine Guillemette) et batterie (Stéphane Galland). On a quelques surprises avec différents invités pour entendre encore plus d’instruments à vent notamment, et aussi un moment dédié aux percussions.


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Il y a un côté pop et electro en apparence, mais aussi beaucoup d’influences jazz fusion et funk, le son des claviers est terriblement bon, par moments on sent un côté Herbie Hancock période Headhunters pour le côté groove ou un côté Weather Report pour le côté de la recherche harmonique. Mais ça reste très personnel et original, Ibrahim Maalouf s’inspire de beaucoup de choses différentes pour créer sa musique. Bref, ça sonne, ça groove, le public est conquis. À noter aussi un remarquable jeu avec des ombres chinoises qui apporte une originalité marquante visuellement, avec notamment la participation d’un danseur, le tout en interaction avec la musique.

Ibrahim Maalouf a aussi le don de faire participer le public, de créer une vraie interaction pour que le spectateur devienne aussi acteur du spectacle. Le public est invité à chanter, se mettre debout, danser durant certains morceaux. Le musicien sur scène est plein de bonne humeur et bonnes vibrations, il semble vraiment heureux d’être là, on se croirait presque dans une soirée entre proches voulant partager un bon moment de musique.

Ce qu’on remarque, c’est vraiment le côté « show » du concert, avec une importance accordée non seulement à la musique mais aussi au visuel avec une vraie mise en scène, des lumières variées, divers éclairages, et l’utilisation de différents procédés comme les ombres chinoises et les projections vidéo, le tout en interaction avec la musique.

Côté musique, on sent que les morceaux se veulent accessibles au premier abord. Mais derrière le rythme de base mis en avant et des mélodies et harmonies faciles à capter, on peut écouter une richesse dans l’arrangement donnant de l’originalité, de la musicalité et de la puissance au discours musical. Les mises en place rythmiques sont souvent complexes mais cela ne gêne pas à l’écoute car est mis en avant un rythme, un beat simple. Les mélodies sont simples mais pas simplistes, avec la possibilité de les faire chanter, mais on découvre derrière elles une richesse des arrangements entre divers instruments et sonorités, sans oublier des développements harmoniques à la fois beaux et audacieux propres au jazz.

Black & Red Light est présenté sur scène, mais on n’oublie pas pour autant des morceaux du reste de la discographie de la carrière d’Ibrahim Maalouf, comme par exemple l’album Illusions, ou encore son travail pour le cinéma. Musicalement, on voyage entre jazz, rock, funk, musiques du monde, il y a même des moments proches du hard rock et un moment ska... On semble voyager entre jazz et Orient le tout dans un contexte pop electro. Par moments, on pense même à des musiques progressives, du rock progressif. Bref, une belle fusion musicale dont Ibrahim Maalouf a le secret, lui qui arrive désormais à créer une musique accessible tout en s’inspirant de différents styles et en évitant de tomber dans la facilité. Pas de soupe musicale, mais de vrais bons et beaux morceaux de musique !

 

    Questions Réponses à Ibrahim Maalouf

    Bienvenue en Haute-Savoie Ibrahim Maalouf ! Pouvez-vous décrire la musique de l’album et le spectacle que vous allez proposer sur scène ce soir ?

    C’est un concert issu de la tournée Red & Black Light correspondant à l’album du même nom. J’aurais du mal à décrire la musique car je n’ai pas assez de recul je pense... En général les personnes qui écoutent sont beaucoup plus douées que moi pour répondre à cette question !

    Vous avez rapproché les musiques d’Occident et d’Orient notamment grâce à votre trompette originale. Quelle(s) voie(s) musicale(s) voulez-vous poursuivre ou découvrir ?

    Je ne sais pas si ce que vous dites est si vrai que cela. C’est une analyse comme une autre. De mon côté j’ai plus le sentiment d’exprimer qui je suis avec des notes, des sons, des images sonores. Ma voie/voix, c’est celle-ci. Et j’espère la garder le plus longtemps possible !

    Quels sont les artistes et groupes qui vous ont influencé ?

    Je n’ai jamais fonctionné comme cela... Je n’ai pas de groupe ou d’artiste qui m’ait plus influencé que les autres. J’ai toujours écouté de tout et j’écoute toujours de tous les styles, mais ce sont des phrases, des sons, des passages qui vont me faire vibrer. Pas l’artiste dans sa globalité.

    Quels sont les artistes et groupes que vous écoutez actuellement ?

    En ce moment je travaille sur mes musiques et ça me prend tellement de temps que je n’ai pas le temps d’écouter autre chose...

    Quelle est votre définition de la musique ?

    C’est l’environnement, le paysage dans lequel on vit lorsqu’on ferme les yeux.

    Quelle est votre définition du jazz ?

    Je n’en ai pas. Chaque personne définit sa culture selon son éducation et ses valeurs. Pour moi, il n’y a pas du jazz, il y a une culture qui évolue. C’est comme la notion de musique du monde, pour qui est-ce considéré comme « du monde » et non pas « musique » à part entière ?

    Quels sont vos projets à venir ?

    Plein de choses !!! Des albums, des musiques de film, des musique pour la danse, de l’enseignement, de l’improvisation à outrance !!

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