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La route du Rock est une quête d’absolu

Axel Bauer, en power trio de choc

mardi 19 mars 2019 par Lionel Fraix photographie , Sylvie Chareun rédaction CC by-nc-sa

Compte-rendu Entretien

Des rythmes changeants, des nuances et des élans vers un absolu non encore trouvé, voici ce qui pourrait résumer à la fois la vie et la carrière d’Axel Bauer jusqu’à présent, mais aussi l’ensemble de ses oeuvres musicales.

Et pour commencer sa tournée 2019, un concert équilibré, allant frapper là où il faut, un trio de musiciens au top, un set couvrant toutes les teintes des albums d’Axel Bauer et le partage avec le public.... nous y étions.

Accueil simple et franc, écoute et attention portée à mes questions.... Axel Bauer nous répond.

Merci de nous recevoir, on sait que de préparer une tournée de concerts c’est un peu de stress.

Oui d’autant plus que là c’est une reprise (une nouvelle tournée NDR) avec de nouveaux musiciens, c’est particulier, d’où la raison pour laquelle on a répété trois jours avant pour mettre en place le set.
Mais effectivement j’ai pas joué depuis début décembre, ça fait quelques mois maintenant, et c’est avec un nouveau bassiste, un nouveau batteur. On sait que le trio doit être très soudé quand même, les musiciens doivent vraiment jouer ensemble, et là c’est une première pour nous. Ce sont de jeunes musiciens de la scène, on va dire funk-jazz plus que rock.

C’est le premier concert de cette tournée 2019, est-ce un concert différent de ceux qui suivent, une sorte de validation ?


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Axel Bauer
Espace Jean Blanc@la Ravoire, mars 2019
© Lionel Fraix

Disons qu’il faut bien commencer quelque part (rires) !
Vous savez, maintenant comme j’ai un petit peu d’expérience, je contrôle moins en fait, disons que je sais qu’il y a beaucoup de paramètres dans un concert, que même si on veut bien faire et que j’ai une super équipe, et des supers techniciens, etc, on est jamais à l’abri d’un truc qui se passe différemment. Et même par moment, aussi dans les bons cotés, c’est à dire on peut avoir une improvisation qui est géniale, on ne sait pas du tout.

Il y a très longtemps, ça me le fait moins maintenant, un soir de pleine lune j’ai eu plein de trucs qui sont tombés en panne ! (rires) C’est peut être un peu abstrait ce que je vous dis, mais j’essaye le plus possible curieusement, de m’attendre à rien en fait.

Ça me donne peut-être aussi l’énergie de ne pas m’inquiéter et d’être dans le présent, c’est pas du tout du laxisme. Mais souvent avant les concerts je me sens un peu dans les vapes, comme si mon corps se mettait en repos, parce que c’est quand même assez physique, il y a une énergie rock dans ce que je fais, je me rends compte à chaque fois que je le fais : « ah oui c’est pas de tout repos ! Faut produire une certaine énergie. »

J’ai lu et écouté plusieurs de vos interviews, remarqué votre attachement au présent.
Vos influences musicales ont-elles beaucoup changé dans le temps ? Et ont-elles par conséquent modifié votre jeu de scène, vos arrangements ?

(temps de réflexion)

Je crois qu’il y a des premières amours, on va dire, avec la musique et qui restent toujours présentes parce que c’est des moments où on était un peu comme une page blanche, on était complétement vierge d’émotions fortes et puis on rencontre des groupes, des musiques, des musiciens, et on a les premières envies qui commencent à apparaitre, et ça je pense que ça s’efface jamais.

Il faut être fan mais il faut aussi être fan de soi

Je suis capable de chanter tout Quadrophenia [1], qui est un des albums mythiques de ce groupe les Who. Un jour quand même, il y a une dizaine d’années, je l’écoutais en boucle et j’étais avec des gens qui ne connaissaient pas du tout les Who ni cette musique, et là je me suis dit : mais en fait c’est pas terrible terrible (rires) ! Enfin je veux dire, c’est très bien, c’est super Quadrophenia, mais j’avais mis ça comme si c’était une symphonie de Mozart, alors que finalement je me suis rendu compte que je connaissais tout comme un fan connait absolument chaque détail d’une musique.

Tout ça pour dire que la relation entre ce qu’on aime et pourquoi on l’aime est parfois faussée, c’est comme la relation amoureuse, après on se voit un peu différemment.

J’aime pas, d’ailleurs l’idée d’influence, même si on est influençable. Quand je compose, si je sens que j’ai envie de faire quelque chose qui est assez énergique et que je suis chez moi, il faut bien que je sois influencé par quelque chose, alors peut-être que je vais partir d’un groupe qui est très puissant et puis je vais jouer, essayer de me placer dans le rêve de l’impression corporelle que je peux avoir, ça rappelle un peu des souvenirs, mais en fait c’est MES souvenirs que ça rappelle. Et au bout d’un moment, même si je pars de la musique d’un autre et bien je vais sur la mienne.
« Rester dans la musique de l’autre c’est à dire rester en référence, on arrive pas à se trouver comme ça. Il faut être fan mais il faut aussi être fan de soi, dans le sens de ce qu’on a de meilleur à donner, c’est pour ça que les gens nous aiment je pense. » Pas parce qu’on refait la musique des autres très bien, mais plutôt parce qu’on arrive à travers toute la foultitude d’influences qu’on a reçues à se trouver nous même, et à donner autre chose.


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Axel Bauer en trio
Espace Jean Blanc@la Ravoire, mars 2019
© Sylvie Chareun


Alors, dites moi, comment va être votre nouvel album, que vous travaillez avec Lena Cohen ? Quel style ?

Lena c’est une grande coach de cinéma, qui travaille avec des acteurs, elle et son mari sont script doctor, c’est des gens qui sont des experts, on va dire des experts comportementaux, c’est pas des psy, même si il peut y avoir un coté psy là dedans. Je sais que Juliette Binoche par exemple, travaille avec une grande coach américaine. C’est des gens qui sont très très pointus sur le fond des choses, sur les textes, sur ce que ça raconte et Lena qui est une personne très intelligente et qui a un grand cœur aussi, travaille comme ça sur certaines chansons pour aider à en préciser le fond pour le public, pour que les chansons soient le mieux possible ou sur des scénarios de films, et c’est dans ce sens là qu’on travaille ensemble.

C’est pas toujours facile à expliquer son travail, c’est un travail qui amène à clarifier le fond des choses en fait.

Ce qui est intéressant c’est que par le travail qu’on a fait ensemble, j’ai pu comprendre que certaines chansons que j’avais faites, n’étaient pas très claires pour l’autre sur ce que je voulais dire. Ce travail avec Lena me permet, quand j’écris, d’être plus en clarté avec ce que je veux raconter.

Et donc quel style ? (rires)

pffff Je me rends compte aujourd’hui que je renie pas un certain classicisme, j’ai appris à jouer de la guitare, que ce soit une guitare sèche ou une guitare électrique, et ma façon d’en jouer prend ses influences quand même dans le blues anglais, dans le blues américain, et la pop anglaise donc il peut y avoir un coté comme ça.
J’ai bien aimé revenir finalement à ces chansons un peu écrites à la mode 1990, pas forcément rock dans le sens très énergiques, mais je peux avoir des ballades rock, ce genre de choses. Pour l’instant j’en suis là.

    Impressions de concert

    Axel Bauer, chanteur, auteur-compositeur, guitariste que beaucoup connaissent à travers ses titres phares : Cargo, Éteins la lumière, A ma place.... commence une tournée 2019 par la salle de l’espace Jean Blanc à La Ravoire, une salle de 400 places assises...
    Axel a dit à plusieurs reprises dans des interviews, qu’il préférait enregistrer en studio entre ses tournées, plutôt que d’arrêter la scène quelque temps pour enregistrer. Je retrouve là le sentiment que j’avais déjà eu lors d’un de ces concerts, c’est un artiste « de scène ».

    La façon dont j’ai vécu cette soirée est sans doute influencée par plusieurs paramètres : j’avais lu le livre [2] écrit par Axel Bauer, et j’ai eu la chance de l’interviewer juste avant le concert.
    L’interview fut plaisante, une voix médium et posée, un homme tranquille et présent, une attitude de ’bien’ répondre à nos questions, comme s’il voulait nous faire plaisir à tout prix, des sourires et quelques rires ont ponctué ce moment.
    La lecture du livre fut chaotique, questionnante mais attrayante, l’écriture et le rythme de la syntaxe évoluant comme l’histoire et les albums d’Axel Bauer, alternant le plus séquencé et le plus calme.

    La salle sera pleine, dans la file qui attend, des personnes de tous âges, mais des personnes pressées d’entrer ! Je suis curieuse, l’interview m’a mise en appétit, la rencontre si fluide avec cet artiste énigmatique m’a mise en attente.

    A l’image des albums successifs d’Axel Bauer, le concert est tout en multiformité avec un set diversifié et finalement très cohérent. C’est agréable, on ne se lasse pas, on ne voit pas le temps passer. C’est énergique, franc et généreux.
    Le trio fonctionne très bien, les deux acolytes d’Axel Bauer (Ouriel Ellert et Antonin Violot) emmènent la rythmique avec énergie, précision et talent, Axel Bauer sert largement le chant, la guitare, l’impro... et quel guitariste !!!

    Le titre Éteins la lumière est bien un pic dans le concert, faisant se lever de nombreuses personnes, malgré l’absence de fosse dans cette salle. Le titre A ma place, avec Axel seul à la guitare acoustique permet un duo entre les femmes du public et Axel, un moment à la fois intense, confidentiel et doux.
    Bien sur Cargo est joué, longuement, avec sa partie instrumentale, solo de guitare, bassiste engagé et batteur énergique.
    Le set se déroule, accordant du temps aux solos de chacun, laissant la part belle aux musiciens tout en respectant les chansons, et on finit sur une majestueuse reprise de Jimy Hendrix. Je n’en dévoilerais pas plus ...

    Un rappel bien sur, et une fin de concert avec le puissant et progressif Laisse venir (mon morceau préféré), et toute la générosité encore de sa deuxième partie instrumentale.
    Un concert équilibré, allant frapper là où il faut, un trio de musiciens au top, un set couvrant toutes les nuances des albums d’Axel Bauer et le partage avec le public.

    RDV le 2 juillet à Chambéry pour le festival Les Estivales de Savoie !


Vous avez un rapport sensuel à la guitare...

Qu’est ce que vous appelez un rapport sensuel avec la guitare ? (sourire) (« je répète ce que vous avez dit dans une interview ! »)
Oui oui j’ai pu dire ça, dans le sens sensuel, pas dans le sens sexuel je veux dire, même si la guitare rappelle le corps d’une femme.

Pourriez vous envisager de faire un concert, ou tout du moins un morceau sans guitare, juste au chant ?

Pas en trio là, mais je l’ai fait régulièrement, quand on était à cinq il y avait un autre guitariste, souvent je lâchais la guitare, je ne faisais que chanter sur certaines chansons, par contre je suis un piètre danseur donc je reprenais la guitare.

Quand je dis sensuel c’est parce que c’est vrai, on voit d’ailleurs les grands guitaristes, Jimi Hendrix par exemple, avoir la guitare en bandoulière et faire sauter des crêpes dans la poêle. Le violon, on s’imagine mal faire à manger avec, on pose le violon, alors que je peux continuer à avoir la guitare et parler avec vous.
Donc c’est une sorte d’instrument qui fait partie de votre corps au bout d’un moment, on est toujours en train de gratter, nous les guitaristes. C’est dans ce sens là, voilà.


Nous sommes le 8 mars, jour de ce 1er concert de la tournée 2019, avez-vous un message pour les femmes ?

Moi je suis pas trop pour, enfin c’est certainement utile, c’est pas que je suis pas pour, mais je vois pas pourquoi il y aurait une journée de l’homme, une journée de la femme, une journée des enfants, une journée des animaux, après on n’est pas des choses !
...
Ça dépend ce qu’on met derrière, la journée de la femme est-ce que c’est la journée où on doit se rappeler qu’il y a quand même un certain nombre de femmes battues en France et qu’il faut non seulement le rappeler, mais rappeler le fait que c’est inadmissible et qu’il faut se battre contre ça ?

Quand c’est la journée de l’homme est ce qu’il faut dire aussi qu’il y a des hommes battus, persécutés par des femmes ?
« Moi j’ai une copine, ça se passe bien, ça fait deux ans qu’on est ensemble, on a une relation d’amour où on rigole bien, on est complice, c’est ce que je souhaite à tout le monde. »

C’est une question intéressante parce que ça nous fait réfléchir aux réalités, voilà on le sait un peu plus aujourd’hui. Le changement ça part de soi, si on veut un véritable changement que ce soit dans la société il faut aussi l’envisager pour nous même et nous aider les uns et les autres à changer.

Il n’y a pas de raison qu’il y ait une journée de la femme, la femme n’est pas une catégorie.... Le 18 juin c’est la commémoration de l’appel du 18 juin, donc là on fait un devoir de mémoire sur le fait de se rappeler ce que c’est d’être en guerre, la résistance etc... et je comprends qu’on fasse un acte de mémoire par rapport à certaines douleurs du passé qu’on veut guérir et surtout qu’on ne veut pas que ça recommence …. mais la femme n’est pas sensée être une douleur … (rires).


Ce soir qu’est ce qui nous attend ?

Un vaste programme avec des surprises, un répertoire divers et varié.
Finalement c’est un set tout en nuances puisque il y a des moments très envoyés comme Éteins la lumière par exemple, qui est un peu le pic énergétique du concert, mais je fais aussi A ma place seul en duo avec les femmes du public, de façon très intimiste avec une guitare sèche. Donc on voyage à travers ça et puis après on peut aussi aller dans un Hendrix, une reprise qui peut partir soit dans le blues, soit dans le ’guitar hero’ où on met le feu, et puis on revient à des choses plus poétiques comme le morceau Aveugle dont le texte est écrit par Marcel kanche, plus bashungien j’ai envie de dire aussi sans que ce soit une copie, c’est plus écrit.

https://www.facebook.com/AxelBauerofficiel/

Le surtitre est une expression tirée du livre écrit par Axel Bauer Maintenant tu es seul, Michel Lafon, 2012.

30 ans de carrière - 8 albums - 3 millions de disques vendus - 1 film - 1 livre

Portfolio

Espace Jean Blanc@la Ravoire, mars 2019 Espace Jean Blanc@la Ravoire, mars 2019 Espace Jean Blanc@la Ravoire, mars 2019

Notes

[1Quadrophenia est un album du groupe britannique The Who, sorti en 1973. Producteur‎ : ‎The Who‎, Kit Lambert et Glyn Johns.

[2’Maintenant tu es seul’, Michel Lafon, 2012

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