> Mag > Cinéma > Linda veut du Poulet !
À la lecture de ce titre, et au vu de la durée singulièrement courte du métrage (73 mins), je présumais d’une gamine capricieuse, prête à tout pour avoir son poulet. Mais ce n’est pourtant pas l’impression que me laissaient les traits délicats de son visage aperçu affiché dans le hall de Bonlieu...
Celui-ci m’inspirait plutôt un personnage optimiste et bienveillant, sans que cela n’enlève quoi que ce soit de sa détermination bien apparente.
Quand j’ai réalisé qui en était l’auteur, je me suis emballé...
Il faut dire que la découverte de La jeune fille sans mains à Annecy en 2016 avait été une véritable claque.
À son propos, j’avais alors écrit : « Sans rien savoir de sa réalisation, j’ai été frappé par la cohérence graphique du film du début à la fin. Par expérience, réussir une peinture chinoise est déjà une prouesse. [...]
Tout l’art de la peinture chinoise réside dans la capacité à suggérer l’objet plus qu’à en dessiner chaque contour. L’animation n’est pas l’art du dessin animé, mais celui du mouvement dessiné (d’après Norman McLaren)
Sébastien Laudenbach a marié les deux pour inventer l’art du mouvement suggéré, une prouesse authentique qui rend son film unique et incontournable. »
Là dessus, Sébastien et sa compagne et co-réalisatrice Chiara Malta ne pouvaient pas décevoir. Le style graphique est en tout point comparable à celui de La jeune fille sans mains, même si une esquisse de paysage urbain dégage moins de poésie qu’une masure moyenâgeuse au creux de la foret. On ne saurait leur reprocher de changer d’époque et de sujet.
Quand au scénario, on est rapidement mis en situation : l’histoire s’inscrit sur un fond de crise socio-économique à peine esquissée, et la maturité des brèves réparties entre Linda et sa mère laissent d’emblée percevoir l’humanité des personnages et le réalisme de la mise en scène.
Du moins dans un premier temps...
Très vite, l’histoire s’emballe et devient rocambolesque. Les péripéties s’enchaînent, de plus en plus invraisemblables, pour le plus grand plaisir de la salle qui rit comme un enfant. Le film s’achève ainsi sur une scène de communion sociale ou tous les habitants du quartier se retrouvent réconciliés et rassasiés autour du poulet cuisiné, Linda au milieu, aux anges.
Bref, une histoire drôle, pleine de bons sentiments, éloge du partage et du vivre ensemble, sans prise de tête.
L’an dernier, le Festival avait choisi de primer Le Petit Nicolas, adaptation de la BD éponyme.Outre l’hommage incontournable à ses illustres créateurs, Sempé et Goscinny, le parti avait été pris de couronner un film tout public qui respire le bon vieux temps et la joie de vivre.
S’inscrivant dans la même veine, Linda veut du poulet ! plaira à tous, aux petits comme aux grands, et c’est sans trop de surprise que le Festival d’Annecy lui ait décerné son Cristal du Long Métrage 2023.
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