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Premiers pas en Turakie

dimanche 30 juin 2024 par Tom Rad-Yaute rédaction CC by-nc-sa

Compte-rendu

Le 1er juin dernier, le village montagnard de Theys, en Isère, ouvrait grand ses portes à l’imaginaire, à la fantaisie et à un drôle de penchant pour l’absurde. Dans le cadre d’un bien joli projet collaboratif, placettes, parvis et recoins de jardins sont devenus, avec la complicité des habitants, autant de scènes pour le concentré de théâtre d’objets détonnants de la compagnie Turak.

Tout commence sur un bord d’allée, avec le drôle d’accueil en Turaquie par Michel Laubu, co-directeur de la compagnie - caban élimé de capitaine énigmatique, œil malicieux et accent rocailleux indéterminé, quelque part à l’est. Et un avertissement : ici, vous n’allez rien comprendre mais ne vous inquiétez pas ! Nous sommes là pour vous aider, pour vous aider à BIEN RIEN COMPRENDRE.

Jugements et attentes trop rationnels sont donc suspendus et, sourire aux lèvres, nous emboîtons le pas à de jeunes guides, à la rencontre de cet univers singulier. Et d’abord ces marionnettes caractéristiques, au physique rugueux, au visage ridé et gouailleur de quincailler et à leur

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photo Raphaël Licandro

sourire figé qui nous fixe, immuable et énigmatique comme des échappées malicieuses de l’île de Pâques. Elles ont quelque chose de minéral, d’intemporel, évoquent à la fois l’enfant et le vieillard, le début et la fin, l’ici et maintenant et les temps immémoriaux. Dans un univers improbable de bric-à-brac récupéré, remis à flot, ces faces de caillou lunaires ouvrent des profondeurs et nous racontent une toute autre humanité que les canons de beauté agressifs dont notre monde d’image est saturé. On respire, tout à coup.

Les scénettes, extraites de divers spectacles de la compagnie, font coexister des histoires presque sans parole et une veine plus gouailleuse se jouant de doubles sens et de calembours, qui rappelle parfois l’humour absurde de Raymond Devos. L’écriture est plus ou moins resserrée mais toujours pleine de surprises, dont une rencontre et une déclaration d’amour à un œuf et un final très réussi où un troupeau de tentes Quechua jouera les quadrupèdes imaginaires avant de dévoiler une grande marionnette aux allures de totem.

Sous une pluie orageuse soudaine et les éclairs menaçants, ce cérémonial terminait en point d’orgue ce beau moment d’imagination au pouvoir, cette parenthèse dans le temps.

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