> Mag > Spectacle > Si j’peux pas danser, c’est pas ma révolution !
Avec Underdogs, chorégraphie évocatrice et bouillonnante, Anne Nguyen retrouve quelque chose de l’esprit festif et revendicatif du hip-hop des origines.
Combat de rue au ralenti sous l’œil indifférent d’une statue de la liberté robotique, groupe de personnages qui tour à tour font le geste de lancer –- partie de base-ball improvisée ou émeute nocturne aux cocktails molotov ? — poings levés qui rappellent le Black power ou Black lives matter : les images faisant écho à l’actualité ou à l’histoire se succèdent à un rythme élevé, se télescopent en flashs violents dans Underdogs, chorégraphie survitaminée trempée dans le bouillonnement des États-Unis des années 70. Habitée de bout en bout par le groove, elle tisse éléments éclatés de narration, théâtralité et gestes hip-hop en un ensemble organique vibrant, éclatant, débordant d’énergie communicative.
Le mix chorégraphique d’Underdogs s’appuie largement sur le popping -– style basé sur la la contraction et la décontraction des muscles en rythme, auquel Anne Nguyen, artiste associée à l’auditorium de Seynod, avait déjà consacré Promenade obligatoire, constituée uniquement de variations sur la déambulation. Avec ses effets cinématographiques de gel, de ralenti ou d’accélération soudains, le popping garantit une prise de possession ultra efficace de l’espace de la scène. Les trois danseurs, dont certains collaborateurs de longue date de la chorégraphe, peuvent alors y déployer leur complicité et la complémentarité de leurs styles respectifs : ultra tonicité de Sonia Bel Hadj Brahim, charisme félin de Pascal Luce et élasticité, plasticité d’AAron EVO.
Tout en se plaçant dans le sillage des précédentes recherches d’Anne Nguyen sur la forme de la danse hip-hop, Underdogs, avec sa bande-son soul – dont l’emblématique « Message to the messengers » de Gil Scot-Heron -, se démarque en en proposant une version particulièrement lisible, ludique, accessible et communicative. Avec une première partie déjà bien en place assurée par deux jeunes membres du collectif Hors-normes de Bonneville, c’était un choix idéal pour mettre le spectacle sur la place publique - objectif déclaré de de ces journées de réouverture - et, en quelque sorte, redonner à l’art la place centrale qui ne devrait jamais cesser d’être la sienne.
Durée 50 min