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Sudden infant, l’expérimentation comme seconde nature

samedi 9 septembre 2023 par Christophe Chedal Anglay photographie , Tom Rad-Yaute rédaction CC by-nc-sa

Attelage improbable composé d’un bassiste de jazz, d’un percussionniste de musique contemporaine et d’une figure de la performance noise, le groupe Sudden infant est une des découvertes les plus marquantes de 2022. Leur dernier album, Lunatic Asylum, fourmillant d’idées osées dans des morceaux pourtant accrocheurs, n’a fait qu’aiguiser encore la curiosité. C’est avec beaucoup de simplicité et de spontanéité que Christian Weber, Alexandre Babel et Joke Lanz se sont prêtés au jeu de l’interview, lors de leur passage à la salle genevoise Cave 12.

Joke, tu as transformé Sudden Infant en un trio à un moment où tu étais désillusionné par la scène noise et le milieu dans lequel tu tournais. Quel bilan tires-tu, après presque 10 années d’existence de Sudden infant en tant que trio ?



Joke Lanz
photo Christophe Chedal

Joke : C’est une question intéressante. J’ai beaucoup tourné dans la scène noise et c’était toujours les mêmes gens, les mêmes visages, les mêmes petits clubs. Maintenant, nous jouons dans des clubs un peu plus grands, on peut toucher d’autres personnes, qui viennent aux concerts sans avoir aucune idée de la musique noise. Avec la basse, la batterie et les textes, nous sommes plus proches d’une musique rock mais, tout de même, nous conservons l’esprit Dada, l’esprit fou, l’esprit Sudden infant ! Pour moi, c’est une évolution positive.

J’ai l’impression que vous n’êtes pas très connus en France et qu’il n’y a pas grand-chose d’écrit sur vous en français. Avez-vous tourné en France ?

Alexandre : On aime beaucoup jouer en France. On l’a fait durant les précédentes tournées, peut-être deux ou trois concerts mais on a surtout beaucoup été en Angleterre, en Hollande, Danemark, Allemagne, etc. Hier soir, on a joué à Dijon et l’organisateur du concert nous disait que, comme les textes sont en anglais et font référence à des choses internationales, le public français pouvait parfois être un peu perdu. Je ne sais pas si il avait raison ou pas, mais je trouve intéressant qu’il explique comme ça qu’une partie de l’auditoire n’arrive pas à rentrer immédiatement dans les textes.

Christian : Mais, d’un autre côté, ce n’est pas de la haute poésie et on espère toujours trouver un public qui prenne plaisir à écouter cette musique un peu bizarre et qui s’identifie à l’esprit de ce que nous faisons ! Nous essayons de susciter de la curiosité, de créer des effets de surprise. Nos morceaux suivent rarement les déroulements attendus ! Parfois, ils contiennent beaucoup d’idées différentes et nous, on essaye juste de leur donner tant bien que mal une forme cohérente…

Christian et Alexandre, vous êtes surtout actifs dans les musiques improvisées et contemporaines. Que représente le punk-rock pour vous ? En quoi, est-ce que ça peut être une musique intéressante ?

Alexandre : Ce qui est intéressant, déjà, c’est que Joke nous a appelés, nous. Il voulait un power trio et il a appelé un contrebassiste de jazz et un percussionniste de musique contemporaine ! Ca a créé une attente – du public, mais aussi de nous !
Qu’est-ce qui allait se passer ? C’est ce qui fait que le groupe est intéressant : comment on allait se trouver ensemble ?
On s’est trouvé sur le pedigree de Joke, qui est une entité qui existait déjà : on s’est approprié cette entité en y amenant nos propres pratiques. Celles-ci touchent un très large spectre d’esthétiques, d’intérêts, de curiosités – c’est ce qui nous relie, Christian et moi. A partir de là, on a envie de tout jouer ! Tu nous parles de punk-rock, on en fait mais, surtout, on vient avec tout qu’on entend, tout ce qui nous touche, tout ce qu’on veut essayer et qui s’assemble et se met à cohabiter.

Qu’est-ce qui allait se passer ? C’est ce qui fait que le groupe est intéressant : comment on allait se trouver ensemble ?

Alexandre, j’ai été surpris par le côté très droit de ta batterie dans Sudden Infant. Comment l’as-tu abordée et travaillée ?

Alexandre : Je pense que c’est quelque chose qui s’est construit au fil des albums… En fait, nous n’avons jamais parlé de ça mais je crois que, intuitivement, quand Joke arrive avec une idée – et parfois c’est juste une phrase –, on va toujours rechercher des chemins de traverse, jamais choisir la solution évidente. Pour les grooves de batterie, c’est pareil : il y a très peu de grooves conventionnels. Et puis, je m’intéresse à des esthétiques où le moins raconte le plus, donc ça va resserrer le cadre et ça aboutit à des grooves un peu carré.

Joke : Lorsque j’ai vu Alexandre jouer de la batterie en solo pour la première fois, c’était à un festival à Riga et j’ai été complètement hypnotisé. Ce n’était pas du rock, c’était de la percussion réglée comme une montre, comme une machine. Je me suis dit que si, un jour, je demandais à un batteur de jouer pour Sudden Infant, ce serait lui ! Christian était un ami de longue date, on avait déjà fait plusieurs projets ensemble par le passé. C’était une expérimentation : les deux ne se connaissaient pas et je n’étais pas sûr de ce qui allé se passer. Mais nous sommes encore ensemble et ça fait presque dix ans… c’est bien ! (Rires)

Joke, ta façon d’utiliser ta voix, de scander le texte est très rythmique. Est-ce quelque chose qui s’est accentué dans le cadre du trio ? Est-ce qu’elle vient en premier ou est-ce que vous travaillez la voix comme un instrument parmi d’autres ?

Joke : Naturellement, j’apprends constamment en travaillant avec ces deux musiciens au niveau incroyable. Je travaille des façons nouvelles d’utiliser ma voix, dont je n’avais même pas conscience qu’elles étaient possibles. Je ne suis pas chanteur, je n’ai pas de technique, je viens du mouvement punk, mais travailler avec eux a changé beaucoup de choses pour moi.

J’ai l’impression que, depuis votre premier album aux ambiances très sombres, Wölfli’s nightmare, vous évoluez vers quelque chose de plus clair, de plus enjoué… Qu’en pensez-vous ?

Christian : Notre façon de composer a changé, c’est certain. Au début, nos références tenaient davantage du rock industriel. Pour le premier disque, on n’avait fait que deux répétitions avant d’aller en studio. On n’avait que deux morceaux et on a écrit le reste en studio. Pour le deuxième album, on a aussi fait deux répétitions et on est allés en studio avec quatre idées et demi de compositions mais on commençait à trouver une façon de jouer ensemble. Alexandre commence avec un groove ou je prend la tonalité d’un sample de Joke ou le rythme d’un texte... Le trio, ça fonctionne toujours un peu comme un tourbillon. Pour le dernier disque, on presque bossé une semaine ensemble à Berlin. Chaque matin, quelqu’un arrivait en disant : « Dîtes, j’ai pensé à ça... » et les autres répondaient : « JAMAIS ! » et puis finalement, après tout un processus : « Ah oui… c’est super ! » (Rires) Il y a tant d’idées qui, au début, me laissaient un peu perplexes et, finalement, j’en viens à y trouver beaucoup de choses ! Et puis d’autres, au contraire, dont je pensais au début que ce serait les meilleures et qui sont finalement juste OK. C’est très vivant ! Jouer les morceaux live est une étape supplémentaire : la musique continue à évoluer selon un processus qui n’est jamais très conscient…

Quelle marge d’évolution des morceaux y a-t-il, en concert ?

Christian : Certains morceaux sont très ouverts. On suit le texte ou la voix avec quelques repères, ici ou là. D’autres ont une structure très claire mais les intentions et les façons de jouer peuvent varier…. Nous essayons toujours de trouver des choses qu’on n’a jamais faites avant. Jouer des mesures en fonction de nombres prédéfinies, par exemple, j’ai proposé ça. Aujourd’hui, ça a l’air très naturel mais, au moment de la composition, ça paraissait bien plus compliqué !



Christian Weber
photo Christophe Chedal

Tu fais référence au morceau « Ha-ha-ha 1921 » ?

Christian : Non, pas du tout ! Ca, ça été un autre processus d’écriture.
Alexandre : C’est une mesure en 19 croches et une en 21 croches.
Christian : En essayant de rejouer un riff, je me suis trompé et ai ajouté deux demi-croches. On a alors décidé de combiner les deux versions du riff, celle en 19 et celle en 21. A l’écoute, ça ne fonctionnait pas complètement mais Joke a proposé d’ajouter des sons aux platines. Il m’a envoyé des choses magnifiques, j’ai travaillé les harmonies et, au final, le morceau a fait l’unanimité !

Le texte et le jeu sur la date sont venus après, à cause de la rythmique ?

Joke : Oui, ils n’arrêtaient pas de parler de 19/21 lorsqu’on répétait le morceau, alors on a utilisé ces chiffres pour le nom du morceau, en mettant « Ha-ha-ha » devant…
Christian : Parce que c’est le sample !
Joke : Un journaliste de Berlin m’a posé la question. J’ai fait une recherche et trouvé que 1921, c’est l’année où est sorti The Kid de Charlie Chaplin et c’est également une année où de nombreux partis communistes sont nés. C’était donc une période plutôt passionnante mais, ça, on y a pensé après !
Christian : C’est donc tout un processus. Quelqu’un a une idée, un autre rebondit et c’est toute un histoire collective. On n’est pas Beethoven !
Joke : Mais on a tous envie d’improviser, d’oser des choses qui ne sont peut-être pas « normales », qui sont un peu folles. C’est ça, Sudden infant.

Alexandre : Pour revenir sur ta question sur l’humeur des albums. Pour le premier disque, on s’est retrouvé dans un studio en Pologne, dans une forêt assez sombre – un studio où les Young gods ont enregistré pas mal de disques, d’ailleurs. On essayait de se rencontrer. On est allé chercher des humeurs introspectives peut-être un peu sombres et, en plus, l’univers d’Adolf Wölfli ne respire pas franchement la joie. Les disques qui ont suivi sont le résultat d’un processus de fabrication qui a évolué mais aussi d’une expérience de vie, parce qu’on s’est rencontré, en tournée, en concert, humainement. On s’est mis à oser les choses de manière un peu différente. Dans le deuxième album, il y a un morceau où on balance des noms : « Donne-moi le nom de quelqu’un ! – Valérie Giscard d’Estaing ! – Ha, ha. Trop bien ! » C’est un peu bête et c’est un peu enfantin et je crois qu’on ose de plus en plus avoir cette légèreté. On a deux morceaux dont les samples sont faits par des enfants. Dans le clip de « Head », c’est le nouveau Sudden Infant : ce sont les enfants qui nous représentent. Le sample, c’est mon fils, enregistré quand il avait trois ans. D’ailleurs, c’est drôle que tu parles de The Kid et du communisme à propos de « Ha-ha-ha 1921 » car, si on regarde les paroles de Joke, on tourne généralement autour de l’enfance et de postulats qui sont plus politiques. Ce sont ses deux pôles thématiques…

J’imagine sans peine que les enfants doivent très bien réagir à votre musique. Joke, tu mentionnes souvent les comptines pour enfants, les nursery rhymes – c’est quelque chose que vous imagineriez pousser encore plus loin : écrire, jouer pour les enfants ?

Joke : Absolument. Peut-être pas avec ce volume, c’est trop fort pour les enfants ! (Rires) J’ai déjà fait des choses en solo, de la musique noise pour enfants – avec des ballons, des verres, des bruits qui ne sont pas trop forts. Le harsh noise mais un peu… playful  ! Ce serait génial de jouer devant un public d’enfants !

Votre disque commence avec « Good morning ! », un morceau dans lequel tu présentes le disque, le studio, les musiciens ou l’ingénieur du son. Est-ce que tu peux nous raconter comment t’es venue l’idée de cette introduction ?

Joke : (Rires !) C’est Alexandre qui nous avait montré les vidéos de David Lynch sur Youtube, où il dit juste « Hello ! Here is the weather… Have a great day ! » Ca nous a bien fait rigoler !
Christian : Durant cette semaine de travail, on commençait tous les jours par une de ces vidéos. On avait ce morceau sur lequel Joke ne savait pas trop quoi faire et on lui a dit : « Fais le weather report, comme David Lynch ! »
Joke : On s’est mis à jouer et, derrière la fenêtre, j’ai aperçu l’ingénieur du son et je me suis mis à improviser : « Studio Bukelini, Kreuzberg, Berlin, soundmen : Andi Bukelini and his assistants, etc, etc. »

Il y a cet autre morceau du disque « Il y a des enfants », sur lequel Franz Treichler des Young Gods intervient…

Joke : Oui, on lui a envoyé le morceau en lui disant de faire à peu près ce qu’il voulait. On a collé ce qu’il nous a envoyé et ça marche bien, c’est cool.

On avait ce morceau sur lequel Joke ne savait pas trop quoi faire et on lui a dit : « Fais le weather report, comme David Lynch ! »

Sur ce titre, tu cites des paroles du morceau « Le moribond » de Jacques Brel…

Joke : Oui, j’aime beaucoup ce morceau, ce refrain que j’ai collé à côté des enfants. Je prends beaucoup de notes quand je voyage et, dans mon petit cahier noir, j’avais cette idée de faire quelque chose en français pour le groupe. Et pourquoi pas Jacques Brel ?

Quelle réception le disque a-t-il eu ? Êtes-vous contents de l’écho qu’il rencontre ?

Joke : Les retours qu’on a eus sont très positifs mais je suis quand même un peu triste qu’il n’y en ait pas eu davantage. On a essayé : on a envoyé le disque à beaucoup de journalistes et une personne s’est occupé de ça à Hambourg. Le problème avec Sudden Infant, c’est qu’on ne peut pas nous mettre dans une boîte avec une étiquette « post-punk » ou « heavy metal ».

Alexandre : Pour le précédent album, on a eu des reviews invraisemblables dans des magazines de métal qui se plaignaient de la qualité du chant de Joke parce que ça ne correspondait pas à leur attentes. Pour moi, c’était plutôt une bonne chroniques : ça montrait qu’on n’était pas dans les cordes. Je trouvais ça intéressant ! Le disque actuel, on a eu davantage de critiques presque à 100 % positives. Ce sont davantage des gens qui comprennent et embrassent la liberté qu’on s’autorise.



Alexandre Babel

Vous participez à beaucoup de projets différents, c’est peut-être un facteur limitant pour le développement du groupe ?

Alexandre : Oui, mais on est chacun actifs dans nos scènes et les gens savent aussi qu’on a cet autre groupe. On va donc se retrouver à jouer dans des cadres qui sont complètement en dehors de ce que les gens auraient pu imaginer, dans des festivals de musique contemporaine, par exemple. Et, forcément les gens qui nous programment vont être des gens curieux et ouverts et, personnellement, je n’ai jamais autant de plaisir à travailler qu’avec des gens curieux et ouverts.

Quelque chose qui m’a frappé, c’est que le mot de « Dada » qui a été un des premiers prononcés et qu’il est revenu plusieurs fois. Vous êtes toujours en relation avec cette explosion qui a eu lieu il y a quand même plus d’un siècle ? Qu’est-ce qu’elle signifie pour vous ?

Joke : Oui, l’idée de Dada a été quelque chose de très important pour moi quand j’ai commencé à faire des choses expérimentales, noise, indus et de la performance corporelle. J’ai longtemps habité à Zurich, où se trouvent le Cabaret Voltaire et la collection Dada, au musée des Beaux-arts. Même si, aujourd’hui, on fait des choses plus accessibles, cela reste une part importante de Sudden Infant, une part un peu folle.

Alexandre : Dada, le choix du nom du mouvement avait été fait en ouvrant au hasard le dictionnaire et, par moment, c’est comme ça qu’on travaille la composition. Une liberté inconditionnelle, c’est comme ça que je comprend l’idée de Dada aujourd’hui.

Christian : On ne ressent pas du tout l’envie de faire telle ou telle musique. C’est très peu défini et c’est peut-être ça, le moment Dada. On prend vraiment tout ce qu’on trouve et on essaye de lui donner une forme mais ce n’est jamais une discussion esthétique, ce n’est jamais essayer de donner un genre. On n’a pas le désir d’inventer un style, on fait juste ce qu’on veut. Joke m’a fait découvrir énormément de styles, Alexandre et moi connaissons également une grande quantité de musique : on se sent vraiment connectés à une longue tradition musicale mais pas juste dans le sens de la musique de telle ou telle période mais dans un sens ethnologique, qui va du plus primitif au plus contemporain. Je me sens de plus en plus faire partie de ce grand récit-là, et avec ce groupe en particulier. Je déteste les approches éclectiques parce qu’elles sont souvent superficielle. Nous recherchons des choses profondes et la source, c’est toujours quelque chose de social, d’humain. Bien sûr, on tire avantage de tout ce qui a été créé avant. On prend la liberté de jouer avec.

Alexandre : Cette idée de faire quelque chose qui ne ressemble pas à ce qui existe, on n’en a jamais parlé, on n’a jamais voulu faire ça. Si on m’avait dit : « Tu vas jouer dans un groupe qui s’abreuve à toutes les sources », je ne sais pas si j’aurais été intéressé. On n’a jamais désiré cette chose, elle est juste arrivée.

(...) on se sent vraiment connectés à une longue tradition musicale mais pas juste dans le sens de la musique de telle ou telle période mais dans un sens ethnologique, qui va du plus primitif au plus contemporain.

Cela me fait penser à une autre interview d’un autre groupe suisse, eux-aussi à cheval entre la musique contemporaine et le rock, et qui ne croyaient pas vraiment à un échange possible entre ces scènes.

Alexandre : C’est un peu utopique…

Ce sont tout de même des mondes hétérogènes… Joke, tu te présentes comme un musicien underground mais, pour quelqu’un qui a une formation musicale construite, je ne sais pas ce que la musique punk peut représenter…

Joke : Pour moi, cela a représenté une complète libération…

Christian : Encore une fois, cela dépend du niveau de profondeur auquel on se situe. A un niveau superficiel, le punk c’est une musique très codifiée. Mais Joke parle d’un esprit, d’une certaine attitude, d’une certaine liberté de penser…

Et, pour finir : pourquoi la casquette de cycliste ?

Joke : J’aime beaucoup les casquettes, j’en ai toute une collection. Ce qu’il y a dessus, je m’en fous ! (Rires) Regarde, j’en ai encore une avec « Brooklyn » et une autre avec « Cycles and coffee » ! J’en avais une, j’en ai acheté une deuxième et maintenant, on me donne des casquettes !

Le site du groupe : http://www.suddeninfant.com/

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